Par Nelson Dumais
Une des raisons qui explique le peu de popularité du commerce électronique auprès des consommateurs, c’est le fait qu’on doit y utiliser sa carte de crédit. À tort ou à raison, le Net a été accusé de tous les maux, de tous les crimes, et nombreux sont les gens qui craignent d’y risquer leur numéro de carte. Mais voilà que cette situation pourrait bientôt changer grâce à Othentik Technologies une entreprise de Montréal qui a mis au point un système de paiement direct par Internet. Autrement dit, il sera bientôt possible de s’acheter des CD sur le site Web d’Archambault ou de payer une facture reçue par courriel en utilisant un procédé très simple équivalant à une carte de débit bancaire.
Chaînon manquant
On peut se demander pourquoi ce chaînon manquant dans la gamme des services bancaires n’est pas apparu avant. C’est que l’idée a beau relevé du gros bon sens elle a pour cadre le monde très complexe des banques, du système Interac et de la concurrence mondiale. Les regroupements d’intérêts sont nombreux, les forces pas toujours convergentes et les initiatives, généralement très onéreuses.
Pensez-y ! Vous êtes jeune, on est en 2000, 2001, 2002, la majeure partie des petites entreprises point-com, des bineries généralement surévaluées en Bourse, se sont écrasées, ruinant plus d’un porte-feuille, et il vous faut convaincre les ligues majeures que votre binerie détient LA solution qu’elles recherchent. Rien de moins !
Vous devez en effet persuader la Banque Royale, la CIBC, Desjardins et tout le Saint-frusquin d’utiliser votre techno de paiement électronique pour que leurs clients puissent payer leurs taxes à la Ville, s’acheter un livre chez Amazon ou s’offrir un billet pour l’OSM.
Il vous faut convaincre les gens d’Interac, ceux qui régentent les paiements par carte de débit que grâce à vous et à votre technologie il leur sera possible d’étendre leur service au commerce par Internet. Ouf! Or, Patrick Rioux et Francis Mathieu respectivement PDG et 1er vice-président y sont parvenus. Enfin, presque. Partout on estime que la technique développée par ces deux jeunes entrepreneurs (ils ont 31 ans) est à point. Partout, on se dit intéressé. Le seul problème, c’est de savoir qui va commencer à l’utiliser, qui va partir le bal. Tout le monde se regarde : les marchands, les banques, Interac. Bref, la bulle pourrait éclater sous peu, et la première mise en service pourrait se faire chez nous, territoire où historiquement, les guichets automatiques ont connu le taux de pénétration le plus rapide.
Fallait seulement y penser
Le principe est très simple et se déroule à la vitesse de la lumière. Tout commence par une facture que reçoit le consommateur (par courriel, dans le cas du Gaz, de la Ville, etc, ou par fenêtre, dans le cas d’un site de commerce en ligne) et sur laquelle une modalité d’interface lui permet d’effectuer un paiement direct.
Il lui suffit d’indiquer quelle est son institution financière. Dès lors, l’entreprise émettrice de la facture transfère les détails de la transaction à l’ordinateur-serveur où a été installée la techno d’Othentik, lequel retransmet instantanément l’information à la banque ou à la caisse du consommateur. Le logiciel permet alors à l’institution d’ouvrir une fenêtre protégée (une fenêtre https://) en surimposition sur la session Internet du consommateur pour peu que ce dernier dispose d’un accès Internet à son compte bancaire, service que fournissent toutes les institutions. Tous les détails de la transaction y sont précisés, et le consommateur doit alors cliquer son acceptation. La banque ou la caisse approuve ensuite la transaction et en informe le serveur Othentik pour qu’il puisse en aviser l’entreprise à l’origine de la facture. Ne reste plus qu’à féliciter le consommateur et à clore la transaction. Comme dans la vraie vie avec une carte de débit! Plus simple que ça, tu meurs!
Pas si mal pour une petite boîte qui vit depuis trois ans de love money et d’investissements privés, dont ceux de Martin Bouchard, PDG de Copernic, et de Gilles Sansregret, PDG de Dans un jardin. Comme on dit dans de tels cas, affaire à suivre!
Nelson Dumais, Journal de Montréal – 4 juin 2003
Cet article a également été diffusé dans le Journal de Québec ainsi que
sur le site de Monsieur Dumais : http://www.nelsondumais.com